paluches, pognes, menottes, mimines et caetera
[illustration : Etude de mains, Léonard de Vinci]
Je tiens dans la paume de ma main
Un tout petit rien
Une écaille
Une écorce
Une faille
Un croc d’alligator
Un souffle du vent
D’Oulan-Bator
Je tiens dans la paume de ma main
Un tout petit rien
Qui frissonne
Qui gigote et déraisonne
Qui empoisonne
Une épine
Une écharde
Le fil tiré
De vieilles hardes
Un œil ouvert
Une paille de fer
L’hématome violet
D’une airelle écrasée
La gifle lente
D’un souvenir usé
Je tiens sans le savoir
Le secret
Des désespoirs
L’alpha d’une existence
L’odeur des soirs
Et l’élégance
D’un arrosoir
Et puis j’ai aussi la tienne
Depuis si longtemps dans la mienne
Qu’elles ont saigné sur les mêmes briques
Qu’elles ont porté
Les mêmes barriques
À faire saillir les veines,
Des mains d’homme de peine
Et puis dans la paume de ma main
Il y a la tendresse
Et la confiance d’un enfant
La force d’un cri
Et de poings minuscules
Il y a la caresse
Des doigts poisseux de confiture
Il y a l’émotion
Que je ne sais pas dire
Mais dont je suis sûre
Il y a l’amour
Qui soutient l’édifice
Échafaudé
Dans la paume de nos mains
Serrées.