Intérieur Crépuscule
[variation sur le texte précédent ; avec toujours en illustration une oeuvre de Jennifer Cronin. Je pense qu'on utilise le même gel douche ... ]
La lumière coule entre la porte et le mur
La maison vit les dernières heures d’un jour triste
Tu viens mourir dans l’interstice
Comment on sait que c’est fini ?
Que la fosse est couverte
Que les sales peurs les errances les cauchemars
Y sont bien clos pour jamais ?
Je suis sur le départ
Il n’y a pas de hasard
Tu restes planquée
Assise et tu tiens ton ticket
Je serre entre mes dents ce bonheur au goût de flotte
Je mords, fort, pour étouffer les cris
Sur le quai de la gare.
Comment on sait, hein, qu’elle est partie,
La conne, la pauvre, la folle,
La non-normée,
L’alarmée ?
Je suis sur le départ, crois-le, il n’y a pas de hasard
J’ai pris mon billet dans tes pleurs endormis
Je suis.
Toi, oublie de vivre,
Rien ne t’attends, vois ta peau fripée,
Tes mains sans gants.
Des mots cognent encore dans ma tête
Et s’invitent à la fête
Ils ont l’air hébété des non-nés, des oubliés,
Ils glissent dans la mousse
Mon crâne douloureux
S’esquive en douce…
Comment on le sait, hein,
Que l’on vit maintenant et ici ?
Remonte tes bras sur ton cœur et serre …
J’ai souvent glissé ma langue dans ta bouche
En murmurant des choses
Visqueuses et douces
Regarde-les grimper encore sur les carreaux embués …
Je suis sur le départ
Viens, accompagne-moi sur le quai
Serre-moi entre tes dents
Et apprends.
Que dire
Que transmettre,
Qui être ?
Je me souviens
Quand autour de la baignoire la peur et la mort
Se frottaient les mains, elles brillaient fort
Leur cri sur le tien
Et cette salope, leur sœur la douleur qui me caressait là,
Et qui m’ouvrait ses bras
Comment je sais
Que c’est terminé ?
Sotte fille abusée
Nous sommes sur le départ,
Farandole aux mains levées
Debout sur le quai de la gare
Tape au clavier viens nous virer,
Crève ta vie de mirliton,
Pauvre imbécile il y a de la place encore dans le wagon,
Es-tu certaine que c’est toi qui restes
Que c'est nous qui partons ?